Libanais détenus arbitrairement en Syrie :la politique de l’autruche du gouvernement libanais 

En Janvier 2001, peu se souviennent qu’une commission, présidée par le Ministre d’Etat Fouad SAAD, a été ordonnée au Liban par le gouvernement de Monsieur HARIRI pour faire la lumière sur le sort des « disparus », lorsque des éléments laissent croire que ceux-ci pourraient être encore en vie. 

Les familles des personnes disparues ont évidemment placé de l’espoir dans le travail de cette commission, et ont été, une fois de plus, trahies par les autorités de leur propre pays, qui refusent totalement, et ce depuis plus de dix ans, d’assumer leur responsabilités vis-à-vis de leurs citoyens. 

Dans beaucoup des cas soumis à ladite commission, les disparus sont des citoyens libanais, kidnappés au Liban même, et transférés dans les prisons syriennes. Leur détention est souvent reconnue par les autorités syriennes, plus ou moins officiellement, et parfois même leurs familles ont eu la possibilité de les rencontrer une ou plusieurs fois, sur leur lieu de détention. Ce n’est souvent qu’après que les autorités syriennes les ont fait « disparaître ». C’est à dire que le détenu est placé au secret, et sans aucun contact avec l’extérieur. Les autorités syriennes nient depuis la détention, et il semble que dans certains cas, le nom du détenu ait même été changé pour faire disparaître toute trace de son existence.  

Malgré les efforts des autorités syriennes pour faire disparaître les détenus, les familles des Libanais détenus en Syrie obtiennent régulièrement des informations sur le sort des leurs par d’anciens détenus, libérés des prisons syriennes.

 Le Liban, comme la Syrie, ont ratifiés des accords internationaux, notamment le Pacte International relatif aux droits civils et politiques, qui interdit ces pratiques. Il est du devoir des autorités libanaises de réclamer le rapatriement de leurs citoyens lorsque ceux-ci ont été illégalement extradés en Syrie. C’est à la justice libanaise, et non pas à la justice syrienne, de juger ceux accusés de crimes commis en territoire libanais. 

La Commission présidée par Monsieur SAAD a conscience du fait que de nombreux citoyens libanais restent détenus arbitrairement en Syrie. Elle a reçu elle-même un certain nombre de témoignages d’anciens détenus permettant d’en avoir la certitude. 

La Commission présidée par Monsieur SAAD a bien entendu conscience de l’illégalité de leur détention, au regard des engagements internationaux pris par le Liban et la Syrie, et des lois libanaises.  

Or, cette même commission pratique activement la politique de l’autruche, renouvelant son mandat tous les six mois, sans prendre la moindre mesure, et sans donner de réponse aux familles des détenus disparus. Par son silence, elle essaye de faire oublier ce dossier, et, plus grave, contribue à la torture morale que subissent les familles des détenus. 

Le mouvement franco-libanais SOLIDA (Soutien aux Libanais Détenus Arbitrairement) refuse ces méthodes et demande expressément à la commission de rendre public un rapport d’étape, et de faire le nécessaire pour réclamer officiellement à la Syrie le rapatriement des Libanais qu’elle détient arbitrairement. 

Paris, le 4 Février 2002

 

Détenus libanais en Syrie : les députés doivent rompre le silence officiel 

Le mouvement franco-libanais SOLIDA (Soutien aux Libanais Détenus Arbitrairement) a adressé en décembre 2001, à tous les députés libanais, une lettre relative au sort des Libanais toujours détenus illégalement dans les prisons syriennes. 

La lettre, rédigée en langue arabe, indiquait notamment :

« A notre connaissance, plus de 200 Libanais seraient toujours détenus au secret dans les prisons syriennes (ce chiffre exclut les 95 détenus dont la détention a été reconnue par les autorités syriennes en Décembre 2000). Ces Libanais ont été illégalement enlevés sur le territoire national libanais et extradés en Syrie. (…)

Beaucoup de familles ont rendu visite à leurs proches sur leurs lieux de détention. Les organisations internationales de défense des droits de l’Homme ont également des documents officiels et de nombreuses informations prouvant la détention de ces Libanais en Syrie, qui représente de graves violations du Pacte International relatif aux droits civils et politiques, auquel le Liban, comme la Syrie, sont parties.

(…) sachant que la commission présidée par Monsieur Fouad EL-SAAD a en sa possession toutes les informations nécessaires, nous vous demandons d’intervenir personnellement pour que cette question soit à l’ordre du jour des relations libano-syriennes. » 

A notre grande surprise, aucun des 128 députés à qui ce message a été envoyé, par voie postale, n’a réagi à cet appel… C’est à se demander s’il leur a même été remis. 

La situation doit pourtant les faire réagir :

En effet, aucun député libanais ne peut prétendre que, dans sa région, personne n’a été déporté en Syrie.

Le Président libanais lui-même, le Général Emile LAHOUD, a assisté à l’enlèvement des militaires qui se trouvaient sous ses ordres en 1990, et n’a négocié que le rapatriement des officiers, « oubliant » près d’une trentaine de soldat dans les prisons syriennes.

La Commission sur les disparus présidée par le Ministre Fouad EL SAAD a reçu les preuves formelles que de nombreux Libanais sont toujours détenus au secret dans les prisons syriennes. 

Mais lorsque le Président Bachar El-Assad se déclarait disposé, en juin 2001, à étudier les plaintes des autorités libanaises à ce sujet, aucune demande n’a apparemment été formulée. 

Les autorités syriennes, en maintenant ces Libanais détenus au secret, se rendent coupables du crime continu de disparitions forcées. En effet, si c’est le régime du défunt Président Hafez El-Assad qui a pratiqué ces enlèvements, le régime du Président Bachar El-Assad est également coupable de faire disparaître des êtres humains, en ne libérant pas les Libanais qui ont été enlevés en territoire libanais, et, pire, en ne révélant rien les concernant.

 Les autorités libanaises sont quant à elles complices de ce crime, qu’elles tentent vainement d’oublier, et de faire oublier, en camouflant - avec difficultés - ces violations des droits de l’Homme commises par la Syrie. 

Dans ces circonstances, nous demandons instamment aux députés libanais de faire preuve de courage, et de remplir leurs fonctions de représentants du peuple libanais, en demandant publiquement à la Syrie le rapatriement des Libanais qu’elle détient illégalement.  

Paris, le 1er Mars 2002