L‘ASSASSINAT D’ELIE HOBEIKA
L’AUTRE VERSION
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24.1.03

La version officielle
Assassiné par l’explosion d’une voiture le 24 janvier 2002, l’enquête et les investigations judiciaires sur ce crime qui emporta l’ancien chef de milice avec deux de ses gardes du corps devaient s’arrêter dès le lendemain du meurtre. L’opinion publique était astreinte à se contenter de la thèse officielle insidieusement passée à la presse et qui accuse les services israéliens d’avoir perpétré cet attentat afin d’empêcher Hobeika de témoigner contre le Premier ministre israélien Ariel Sharon, dans un procès engagé à Bruxelles sur les massacres du camp palestinien de Sabra et Chatila.
Le procès, originairement prévu pour le mois de mars suivant, n’eut pas lieu. L’attentat contre Hobeika et ses deux gardes du corps n’était pour rien dans cette annulation.
Entre-temps, d’autres témoignages, rumeurs, explications et recoupements d’informations réelles, généraient une version toute nouvelle de ce triple assassinat, voire totalement à l’antipode de la version officieuse diffusée par les réseaux syro-libanais.

Hobeika avait un seul parrain : Hafez Assad
Contrairement au reste des acteurs de la scène libanaise engagés par les services syriens, Elie Hobeika était le protégé personnel du Président syrien défunt Hafez Assad. Il était le seul, avec Michel Samaha, à avoir accès aux appartements privés d’Assad à Damas. Hafez Assad se sentait redevable à Hobeika pour au moins deux faits majeurs ou « services » rendus par Hobeika au régime syrien.

Elie Hobeika travaillait pour les services israéliens quand, approché par les services syriens, il décida subitement de retourner sa veste et de s’engager totalement au service des réseaux syriens actifs au Liban.

Le second fait ne devait pas tarder à suivre. Quand Hobeika, avec l’aide discrète des Syriens accéda au commandement des Forces Libanaises, il tenta avec forces et fracas de livrer la seule force de résistance chrétienne au dictateur syrien à travers ce que l’on appela à l’époque  «l’Accord tripartite » (faux accord, préparé par Damas et lui livrant le Liban à travers un simulacre de consensus signé par les trois formations miliciennes, chrétienne, druze et chiite).

Reconnaissant, Hafez Assad le nomma ministre dans le premier cabinet qui devait suivre l’invasion totale syrienne du Liban, le 13 octobre 1990. Il fut aussi investi de la fonction de « député » aux premières « élections » opérant sous occupation syrienne en 1992.

Hobeika orphelin 
Le décès de Hafez Assad , survenu le 10 juin 2000, devait couper court aux rêves d’Elie Hobeika, qui bernait ses ambitions par une accession au poste de Président de la République. Confirmé dans sa déception par les élections qui eurent lieu la même année et qui virent son « échec » ainsi que l’arrêt de sa nomination au poste de « ministre », Elie Hobeika se sentait abandonné. En effet la vieille garde de Hafez Assad, demeurée au pouvoir, n’incluait plus Hobeika dans ses projets « libanais ».

Karim Pakradouni, prétendu ami d’Elie Hobeika, avouait dans une interview télévisée qui a suivi l’assassinat, que Hobeika, suite à la mort du Président syrien, n’avait plus d’analyse concernant l’avenir du Liban. En fait Elie Hobeika n’avait plus d’analyse concernant son propre avenir dans le Liban d’aujourd’hui et de demain.

Un chômeur à la recherche d’un travail !
Sans poste politique et sans missions au niveau des réseaux de son employeur syrien, Elie Hobeika devait se mettre à la recherche d’un travail. Il ne se voyait pas actif que dans son domaine professionnel de base : agent de services de renseignements. En effet pour des personnages de la trempe de l’ancien chef des FL, le travail d’espion – homme de main le grisait et lui manquait.

Dans cette recherche de Job, il s’en remet à son confident et ami le Docteur Jean Ghanem. N’ayant pas obtenu de diplômes d’études, Hobeika affectionnait particulièrement la fréquentation et l’amitié de personnes diplômées, Jean Ghanem (médecin), Assaad Chaftari (ingénieur civil)…

L’occasion du 11 septembre 2001
Les actes terroristes du 11 septembre devaient lui ouvrir une porte. En effet les services américains devaient activer leur poursuite de toutes les organisations et activistes impliqués dans des opérations terroristes. Réclamé officiellement par les Etats-Unis, le nom bien connu de Imad Mughniyeh devait se répercuter dans toute la presse. A travers Jean Ghanem qui se chargea de se rendre à l’ambassade américaine à Beyrouth, Hobeika proposa ses services : rechercher Imad Mughniyeh en infiltrant le Hezbollah. Sa proposition fut acceptée, ne fut-ce que pour son expérience professionnelle.

Infiltrer un organisme idéologique, chauffé à blanc par un travail de lavage de cerveau quotidien et continu, ne devait pas être facile. Le stratagème de Hobeika fut vite découvert et les responsables du Hezbollah devaient porter l’accusation de l’intrus devant ses anciens employeurs, à la tête desquels se trouvait le général Ghazi Kanaan, alors Haut-commissaire du régime de Damas au Liban. Décision fut prise par Damas d’éliminer Hobeika, une occasion pour ce régime de se débarrasser en plus d’un témoin qui colportait dans sa mémoire une série infernale de faits et crimes orchestrés et commandités par les caïds de Damas.

Le dîner à l’explosif
Une semaine avant l’exécution d’Elie Hobeika, le docteur Jean Ghanem trouve la mort dans un accident de voiture à deux cents mètres de sa résidence de Hazmieh, dans la banlieue sud-est de Beyrouth. Il conduisait lui-même sa voiture, accompagné de son épouse. Il heurta curieusement un arbre. Son épouse, grièvement blessée devait en réchapper. Le cabinet médical de Jean Ghanem devait à la même période être visité par effractions et ses documents personnels mis à sac. Des rumeurs coururent dans la région que sa voiture avait été trafiquée par des inconnus.

Mardi soir, l’avant-veille de son assassinat, Elie Hobeika fut invité à dîner chez son ancien commanditaire, Ghazi Kanaan, à Anjar, sa résidence officielle au Liban, non loin de la frontière syrienne. C’est durant ce dîner que certaines informations confirment que la voiture blindée de Hobeika devait être chargée d’un explosif dissimulé, armé d’un détonateur à télécommande. L’exécution de l’attentat devait attendre le surlendemain pour éloigner les soupçons sur une relation quelconque entre le dîner et l’explosion télécommandée du jeudi 24.

A l’appui de cette version :
1- Le cadavre de l’un des gardes du corps qui accompagnaient Hobeika devait se retrouver sur le balcon d’un étage de l’immeuble, ce qui conforte l’argument que l’explosion n’était point latérale, en provenance d’un véhicule miné, stationné sur le côté de la voiture blindée transportant les victimes (version officielle. L’explosion devait provenir du dessous de la voiture blindée elle-même.

2- A un Libanais qui, quelque temps avant l’assassinat, posait la question à Washington sur la poursuite des terroristes cachés au Liban, il lui fut répondu que la poursuite était déjà engagée sur le terrain.

3- La méthodologie employée dans l’élimination d’Elie Hobeika s’inscrit en droite ligne avec les moyens utilisés dans l’assassinat du Mufti de la République, cheikh Hassan Khaled en mai 1989, et celui de M. René Moawad le 22 novembre de la même année. Damas est le principal accusé dans ces deux crimes.

4- L’arrêt effectif de la procédure d’investigation policière et judiciaire au lendemain du crime. Ce blocage de procédure est chose courante au Liban depuis le début de la guerre pour tout crime où les services syriens sont les premiers suspects. L’artisan principal de tels blocages n’est autre que Adnan Addoum, officiellement Procureur général de la République, effectivement un exécutant des ordres des services syriens dans le secteur judiciaire libanais.