Libertés - Tony Orian réclame des sanctions contre les responsables des rafles
Un aouniste entame une grève de la faim à Roumieh

Tony Orian, surveillant au Collège des Frères-Mont La Salle, militant du Courant patriotique libre (CPL-aouniste), détenu depuis le 5 août, a annoncé samedi qu’il avait entamé une grève de la faim à la prison de Roumieh où il se trouve actuellement.
Tony Joseph Orian a affirmé dans un message qu’«il continuera sa grève jusqu’à la réalisation» de deux revendications : «La cessation des poursuites et l’annulation des jugements arbitraires et illégaux contre mes frères et mes amis du CPL, et la prise de sanctions et de mesures judiciaires contre ceux qui ont torturé, maltraité et opprimé au ministère de la Défense et devant le Palais de justice».
«Je fais ce que m’oblige à entreprendre ma foi en Dieu et dans le Liban, et je considère que ma grève ouverte est un message adressé à toutes les instances juridiques, humanitaires et spirituelles, afin qu’elles adoptent des positions exceptionnelles face à la sauvagerie extraordinaire qui a touché et qui continue à toucher les Libanais les plus justes et les plus purs», a poursuivi M. Orian. Il a estimé qu’il n’a «d’autre choix» au niveau des moyens que d’entamer une grève de la faim.
Dans un communiqué, le CPL a appelé le monde entier à prendre connaissance du message d’Orian, adressé «à l’opinion publique locale et internationale, à la presse internationale, au secrétaire général de l’Onu Kofi Annan, au pape Jean-Paul II, aux présidents américain et français, au Premier ministre britannique et à tous les responsables arabes et internationaux».
«Tony Orian, pensionnaire de la prison de Roumieh, n’a plus d’autre choix que de parier sur sa vie pour affronter l’arbitraire et l’oppression de la prison», a estimé le CPL.
Le mouvement a, par ailleurs, «fait totalement assumer la responsabilité de la vie de Tony Orian aux autorités politiques, sécuritaires et judiciaires concernées». «Nous demandons à une commission médicale indépendante et spécialisée, formée de médecins qui ne sont pas de la prison de Roumieh, de suivre l’état de Tony Orian heure après heure et d’établir un rapport médical sur son état de santé», a poursuivi le courant aouniste.
Le CPL a également demandé qu’une suite soit donnée aux revendications d’Orian. Il a enfin exigé qu’il soit statué «dans les prochaines heures sur son pourvoi en cassation», ainsi que sur ceux du responsable de la section estudiantine du courant, Tony Harb, et de Maroun Nassif, compagnon de détention d’Orian. «Il s’agit de corriger une erreur discriminatoire inacceptable», a conclu le CPL, en se déclarant prêt à payer «la rançon nécessaire pour les libérer».

Aoun : « La justice militaire, instrument de vengeance »
Contacté par L’Orient-Le Jour, l’ancien chef du gouvernement de militaires, le général Michel Aoun, a qualifié le maintien d’Orian et de ses compagnons en prison d’ «énorme scandale illégal». «Le tract (le billet hebdomadaire du général Aoun) que ces jeunes gens étaient en train de distribuer lorsqu’ils ont été arrêtés a paru dans les médias audiovisuels libanais et a été publié dans la presse libanaise. Il s’agit donc d’un crime que d’incarcérer ces trois personnes à cause de cela», a affirmé le général Aoun.
«La justice militaire est devenue un instrument de vengeance», a estimé Michel Aoun.
Il a par ailleurs confié à L’Orient-Le Jour que durant sa comparution devant le tribunal militaire, Tony Orian s’était défendu, arguant de l’illégalité de son arrestation et usant des mêmes arguments que lui concernant la parution du tract en question dans les journaux. «Cela a eu pour effet d’alourdir considérablement la peine de prison», a indiqué le général Aoun, en ajoutant que les deux autres aounistes encore détenus, Harb et Nassif, «ne tarderaient pas» à entamer à leur tour une grève de la faim.
Selon ses proches, l’état de santé d’Orian est précaire. «Il ne mange plus rien depuis plusieurs jours, et depuis samedi, 14h, il n’a plus mis une goutte d’eau dans sa bouche. ? ce rythme-là, je doute que son corps puisse tenir plus de deux jours», a affirmé l’un deux. «Dès qu’il a affirmé qu’il avait entamé une grève de la faim, il a été placé dans une cellule isolée», a confié l’un de ses avocats.
Selon une amie, «Tony affirme qu’il est prêt à mourir si ses demandes ne sont pas prises en considération». Dramatique, pour un jeune homme «qui a passé son vingt-cinquième anniversaire – le 16 août – en prison», comme l’atteste un communiqué signé par «ses amis», et qui a battu le record du nombre d’interpellations pour ses opinions politiques. En avril 2000, déjà, il était ressorti de son incarcération à Roumieh, à la suite d’une vague de manifestations aounistes, avec des contusions graves à la colonne vertébrale, résultat d’un évident mauvais traitement durant son interrogatoire.